On parle beaucoup d’hypersensibilité. Ce mot semble poser un nom sur un vécu intérieur : tout ressentir mais de façon décuplé.
Mais est-ce un trait stable, scientifiquement fondé ? Ou une adaptation plus complexe, influencée par notre biologie, notre histoire et notre environnement émotionnel ?
Ce que dit la science
Certaines personnes traitent les émotions plus profondément.
C’est ce que la psychologue Elaine Aron a appelé Sensory Processing Sensitivity (SPS), un trait retrouvé chez 20 à 30 % des gens.
Une étude IRM (Acevedo et al., 2014) a montré une activité cérébrale accrue (insula, cortex cingulaire) face à des stimuli sociaux et émotionnels.
Des revues récentes (Greven et al., 2019 ; Acevedo et al., 2018) confirment qu’il ne s’agit pas d’une pathologie.
Alors d’où ça vient ?
On associe souvent cette sensibilité à des blessures ou des traumatismes, mais elle peut aussi venir de :
- Prédispositions génétiques ou neurobiologiques
- Une manière de traiter les émotions en profondeur
- Une éducation favorisant l’écoute et l’introspection
- Des micro-stress répétés dans l’enfance ou la vie adulte
- Parfois, un attachement insécurisant ou des vécus émotionnels non symbolisés
On ne naît pas toujours hypersensible. On peut aussi le devenir, ou fonctionner ainsi, sans blessure.
Et en thérapie ?
Même si ce n’est pas une notion officiellement “mesurable” en psychologie, c’est une observation clinique fréquente.
Les psychologues rencontrent souvent cette sensibilité marquée, source d’intensité émotionnelle, de surcharge ou d’anticipation relationnelle.
En thérapie, l’enjeu n’est pas de la “corriger”, mais :
- D’en comprendre l’origine
- De mieux la réguler
- D’en faire une ressource plutôt d’un fardeau
J’ai pour l’habitude de dire que quelque chose devient “hyper” ou “hypo”, c’est souvent qu’un déséquilibre intérieur s’est installé. L’accompagnement vise à rééquilibrer ce fonctionnement, si la sensibilité devient souffrance ou frein.
En résumé :
- L’hypersensibilité existe, elle est neurobiologiquement fondée
- Elle n’est pas une pathologie
- Et elle peut devenir une force vivable avec un accompagnement
Références :
Aron (1996), Acevedo et al. (2014, 2018), Greven et al. (2019), Pluess & Belsky (2009), Maté, Fonagy, van der Kolk